Des communes, qui sont nombreuses à cofinancer ces actions, cherchent aussi à faire des économies. Certaines souhaitent aussi plus contrôler ce qui se fait sur leur territoire, souvent en cherchant à substituer à des actions de prévention spécialisée des actions à effet attendu plus direct, plus visibles aussi, du type « médiation de rue ».
Que restera-t-il alors de l’approche et de l’accompagnement socio-éducatif d’adolescents et de jeunes adultes en liens distants, voire sans lien avec les institutions éducatives et sociales de droit commun ? Que restera-t-il du contact et du travail avec des adolescents et des jeunes en révolte ou en abandon de soi, dont on dira alors qu’ils s’écartent de plus en plus du vivre ensemble ? Supprimer la prévention spécialisée laissera de côté les jeunes qui s’enferment dans des certitudes préfabriquées, les délaissés des dispositifs d’insertion, les jeunes squatters, les fugueurs et les errants des centre-villes, ceux dont l’hôpital psychiatrique ne veut plus…
On ne peut pas construire une réponse éducative et sociale en direction des adolescents et des jeunes adultes en dehors de l’articulation permanente entre des actions et des structures socio-éducatives et socio-culturelles destinées à tous tels les services municipaux de la jeunesse, des services et des actions en charge de la tranquillité et de la sécurité publique, et des structures spécialisées dans le contact et le travail avec ceux et celles qui se retrouvent à construire et à conduire leurs vies aux marges de l’intégration sociale.
Les Ceméa soutiennent et défendent une prévention spécialisée qui s’adresse aux adolescents et aux jeunes adultes qui ne trouvent pas leur place dans les dispositifs et les institutions, en train de perdre pied, en train de s’engager dans des prises de risques majeures souvent non repérées par les autres institutions. Les acteurs de la prévention spécialisée sont ici les premiers à être au cœur des situations pour agir, pour prévenir les basculements potentiels.
Les Ceméa soutiennent et défendent une prévention spécialisée multifocale, adaptée aux réalités très diverses d’aujourd’hui, plutôt qu’uniquement intégrée aux programmes et aux dispositifs de la politique de la ville dans une instrumentalisation croissante, au risque alors de ne plus travailler qu’avec une petite partie ciblée des « jeunes de cités » et en se substituant aux actions socio-éducatives de la responsabilité des communes.
Les Ceméa pensent que l’avenir nécessaire de la prévention spécialisée est dans le contact avec les personnes, les publics les plus éloignés de l’action publique, ceci en co-organisation et en complémentarité avec les structures du droit commun chargées de la régulation de l’espace public et de l’action éducative globale.
Contact : francois.chobeaux[at]cemea.asso.fr