La marionnette : un ensemble de pratiques ludiques créatives, une multiplicité de formes
théâtrales spectaculaires, un véhicule culturel majeur. Dans ce premier volet du dossier
nous redécouvrirons quelques pratiques diversifiées de jeu précédées par des constructions
minimales. « Moi, je construis des marionnettes, avec de la ficelle et du papier... »
Beaucoup ont en tête ces paroles de chanson. Au-delà d’une anecdote achetée au
magasin de souvenirs des sentiments, ces quelques mots décrivent bien la démarche
inhérente à tout montreur de marionnettes, amateur ou professionnel. Il s’agit tout à
la fois d’imaginer, associer, penser, dessiner peut-être mais aussi d’agir : faire, pétrir,
couper, ajouter, coller, agrafer, coudre, ajuster, mesurer, froisser, déchirer, manier,
manipuler, déplier, mettre en voix, invectiver, chuchoter, murmurer, faire silence, opiner,
tonitruer et partant s’étonner, s’envoler, faire frisson, frémissements, peur et plaisir.
Ce premier dossier ouvre la piste. En éclaireur, il donne à savourer des gourmandises et
à s’enivrer d’un jeu aux parfums particuliers. La main agit, les doigts remuent, s’agitent, la voix formule, tonne, gribouille, les formes se déploient. Le corps est prolongé parfoisdémesurément, le geste brouillonne et souvent précise, la geste bouillonne, s’insinue
entre le rêve et le réel, fait éclair, orage comme entre le jazz et la java. Et parfois le silence
et l’immobile se font jour entre poétique et verbe. La marionnette, figure de proue, en
poupe, poupée à brandir, à montrer, à revendiquer, média pluriel mais médium singulier,
tellement, qu’il colle à la main qui le nourrit, qu’il la change, la modifie, la modèle comme on travaille la glaise. L’important c’est de jouer, on joue, on met en jeu l’appareil corporel et les rouages des mécanismes de la pensée, de l’invention. la parole est un mouvement de plus, une ondée, une ombre sonore, une mise en mots de l’objet prenant corps,la parole ne s’ajoute pas, elle est là ou pas, elle est partie intégrante du process, au coeur , au choeur parfois, du jeu, du ballet ludique. La marionnette interprète parce qu’elle est là, qu’elle existe. la marionnette est toujours devant et la personne est derrière comme cachée et pourtant bien là, mais pas trop, même si on la voit, même si on la devine et
a contrario peut-être trop même si on ne la voit pas.